Le processus de la diversification
parStanley PraninFrom JapaneseWushuMagazine
Traduction française: Jacques Renaud
Le processus de la diversification technique a commencé en aïkido avant même le décès de son fondateur, Morihei Ueshiba. Parmi les tendances répandues en aikido aujourd’hui il existe l’approche soulignant l’aspect circulaire et le ki, les techniques de ki no nagare, de Doshu Kisshomaru Ueshiba du Hombu dojo de l’Aikikai, la prétendue école de modèle “dur” du Yoshinkan Aikido de Gozo Shioda Sensei, l’emphase sur le concept du “ki” de Shinshin Toitsu Aikido développée par Koichi Tohei Sensei, le système éclectique de Minoru Mochizuki Sensei du Yoseikan Aikido, et le système d’aikido sportif qui inclut la compétition conçu par Kenji Tomiki Shihan.
À ces derniers doit être ajouté le programme d’études technique unifié formulé par Morihiro Saito Shihan, L’approche de Saito Sensei soumet que la corrélation entre le taijutsu et le bukiwaza (l’aiki ken et l’aiki jo) est devenue une norme de fait pour beaucoup de pratiquants d’aikido dans le monde. Ceci est dû en grande partie au succès de ses nombreux livres sur les techniques d’aikido et ses nombreux voyages à l’étranger.
Introduction à l’aïkido
Morihiro Saito était un jeune homme maigre et dépressif de 18 ans quand il a rencontré Morihei Ueshiba pour la première fois à Iwama en juillet 1946. C’était peu de temps après la fin de la seconde guerre mondiale et la pratique des arts martiaux avait été interdite par le GHQ. Le fondateur s’était officiellement retiré à Iwama durant plusieurs années, bien qu’en réalité il ait toujours continué sa formation et la méditation intensives dans cet environnement reculé. En effet, durant ces années d’Iwama, pendant et après la deuxième guerre mondiale, Morihei Ueshiba perfectionna l’aikido moderne.
Parmi la poignée d’uchideshi de ces années difficiles on trouve Kisshomaru Ueshiba, Koichi Tohei et Tadashi Abe. Le jeune Saito a reçu peu d’encouragement au départ et a dû supporter silencieusement une formation intensive et souvent douloureuse. Saito Sensei se rappelle des jours où la pratique en suwariwaza sans fin sur le plancher de bois dur du dojo lui laissait les genoux en sang et infectés. Ces mauvais souvenirs en tant que nouveau venu dans le dojo, il arrive enfin à les surmonter grâce à l’enseignement des innombrables et vigoureuses techniques appréciées par le sempai Koichi Tohei et par Tadashi Abe.
Formation auprès du fondateur
Cependant, petit à petit, sa ténacité a payé et en quelques courtes années Saito Sensei est devenue l’un des soutiens principaux du dojo du fondateur. Il a bénéficier d’avantages de la part des chemins de fer nationaux du Japon afin de passer plus de temps aux côtés de son professeur. En plus des heures qu’il passait dans le dojo, Saito Sensei aidait le fondateur dans tous les moments de sa vie quotidienne dont de nombreuses corvées et du travail à la ferme. Bien que Morihei Ueshiba, son mentor exigeant, ait exigé ce travail, sa récompense était l’occasion unique de suivre la formation du fondateur, et en particulier dans la pratique de l’aiki ken et de l’aiki jo durant environ 15 années. Morihei Ueshiba s’exercerait habituellement aux armes très tôt le matin , lorsque même les étudiants réguliers ne pouvaient pas être présents. Ainsi, ce fut partiellement grâce à son talent inné des arts martiaux, à sa persévérance et partiellement grâce à son programme flexible de travail que Morihiro Saito reçut l’enseignement technique de Morihei Ueshiba.
Vers la fin des années 50, Saito Sensei était devenu le shihan, centre énergétique, dans le système Aikikai, enseignant régulièrement au dojo d’Iwama en l’absence d’Ueshiba. D’ailleurs, il a commencé à enseigner en 1961, chaque semaine au Hombu dojo de l’Aikikai de Tokyo. Il était le seul professeur, sans compter le fondateur lui-même, autorisé à y enseigner l’Aiki bukiwaza. Ses cours étaient très populaires et beaucoup d’étudiants de Tokyo se réunissaient le dimanche matins pour pratiquer le taijutsu, l’aiki ken et l’aiki jo. Lorsque le fondateur décéda, en avril 1969, Saito Sensei est devenu dojo-cho-cho du dojo d’Iwama et également le gardien de l’Aiki Jinja que Morihei Ueshiba avait construit tout proche.
Publication des manuels techniques et voyages à l’étranger.
C’est la publication en 1973 du premier ouvrage de ce qui allait devenir une collection de cinq volumes de livres techniques japonais/anglais qui a établi la réputation de Saito Sensei en tant que premier technicien parmi les shihan de l’aikido. Ces volumes contiennent des centaines de techniques d’aiki comprenant le taijutsu, l’aiki ken, l’aiki jo et les kaeshiwaza (techniques de contre). Ces manuels techniques présentent un système et une nomenclature exhaustive de classification des techniques de l’aikido. En outre, des films d’enseignement ont été offerts pour compléter les livres et ont été reçus avec enthousiasme.
En 1974, Saito Sensei, fit son premier voyage d’enseignement hors du Japon aux États-Unis. J’était présent à ses conférences du nord de la Californie et je me rappelle de la stupéfaction des participants face à sa connaissance encyclopédique des techniques d’aikido. Ceci couplé à sa méthode d’enseignement claire, remplie de nombreux gestes, a rendu les services d’un interprète presque inutile. Saito Sensei a voyagé hors du Japon plus de 40 fois durant ces années d’enseignement et a reçu bien plus d’invitations que son temps et son énergies ne pouvaient en donner.
Iwama : La source pour les pratiquants étrangers
La popularité de ses livres et ses longs voyages hors du Japon ont eu comme conséquence que le dojo d’Iwama est devenu la source pour les étudiants étrangers d’aikido souhaitant s’exercer intensivement et acquérir l’expérience de l’utilisation de l’aiki ken et de l’aiki jo. Au cours des années, des centaines d’aikidoka sont venus de l’étranger et bien souvent, les pratiquants non japonais dépassent leurs homologues japonaises au dojo d’Iwama. Peut-être que le secret du succès de Morihiro Saito Sensei, pour les fervents pratiquants non japonais, est son approche unique de l’art qui est un savant mélange de tradition et d’innovation. D’une part, il est totalement traditionnaliste et enclin à préserver intact l’héritage des techniques léguées par le fondateur ; c’est-à-dire, Saito Sensei se doit de donner une continuité permettant aux pratiquants actuels de comprendre les origines de l’aikido. D’autre part, il a démontré une créativité considérable en recenssant et en classifiant les riches connaissances techniques transmise par Morihei Ueshiba afin d’indiquer sa logique interne et faciliter sa transmission à de futures générations. La clarté de ses méthodes d’instructions a été considérablement reconnue à l’étranger.
Le système d’homologation de l’Aiki ken et de l’Aiki jo
Saito Sensei a récemment énoncé un système d’homologation pour la certification des instructeurs de l’aiki ken et de l’aiki jo serait attribué par le manuscrit traditionnel mokuroku à ceux qui ont démontré certains niveaux de compétence dans le bukiwaza. Séparé du système d’évaluation dan, le but du programme est de préserver les techniques de ken et de jo développées par le fondateur qui sont étroitement liées et inséparables du taijutsu d’aiki. Le makimono incluent les noms et les descriptions détaillées des techniques d’armes d’aiki et développé d’après le type traditionnel mokuroku attribué avant l’introduction du système de grades dan. Cette méthode de certification est peu commune parmi les budos modernes et sera assurément suivie avec un grand intérêt par la communauté des arts martiaux.
Aujourd’hui Morihiro Saito Sensei continue un programme conséquent, enseignant des cours du matin consacrés à l’aiki ken et à l’aiki jo, et la pratique générale en soirées où il enseigne des techniques de taijutsu. En outre, de nombreuses conférences sont tenues tous les ans au dojo d’Iwama, une pratique qui a commencé lorsque le fondateur vivait encore. Il rectifie sans interruption sa technique et conçoit de nouvelles routines de formation pour rendre ses méthodes d’enseignement plus efficaces.
Dans le monde de l’aikido d’aujourd’hui, il y a une tendance toujours croissante à considérer l’art principalement comme un “système de santé” et l’efficacité les techniques d’aiki comme presque sans importance. Dans ce contexte, la puissance et l’excellence des présentations techniques de Morihiro Saito Sensei hors du Japon, est un grand soulagement et est dues à ses efforts et aux efforts de quelques autres, l’aikido peut néanmoins fièrement revendiquer le droit d’être considéré comme un vrai budo .
StanleyPranin
Tokyo, 23 mai 1989